Rapport à F. Hollande, Président de la République Française

61 4. LA DEMANDE D’EUTHANASIE DIRECTE OU PAR SUICIDE ASSISTÉ 4.1. LE DROIT FRANÇAIS ET L’ASSISTANCE AU SUICIDE : L’ASSISTANCE AU SUICIDE PEUT-ELLE ETRE CONSIDEREE COMME UNE PROVOCATION ? En France, le suicide a cessé d’être un crime depuis le Code révolutionnaire de 1791. La philosophie des Lumières, en libérant l’Etat de l’emprise du religieux, a conduit à la dépénalisation du suicide, dès lors que celui-ci relève d’un acte libre. Cette décriminalisation a pour conséquence que l’assistance au suicide ne fait l’objet d’aucune infraction pénale. Par défaut d’incrimination principale, elle ne peut être poursuivie. Le délit de provocation au suicide, institué par la loi du 31 décembre 1987, est parfois invoqué comme un moyen de sanctionner l’aide au suicide. Or, une telle action ne peut aboutir. La loi du 31 décembre 1987 a été adoptée à la suite de la publication en 1982 du livre « Suicide, mode d’emploi », dont la lecture avait entraîné un nombre important de suicides et un émoi populaire. Or il n’existait en droit français aucun texte de loi susceptible de fonder la condamnation des auteurs de l’ouvrage en question. Pour lutter contre ce genre d’écrits, le législateur vota un texte qui aboutit à l’insertion dans le code pénal du délit de provocation au suicide, inscrit à l’article 223-13, aux termes duquel « Le fait de provoquer au suicide d'autrui est puni de trois ans d'emprisonnement et de 45000 euros d'amende lorsque la provocation a été suivie du suicide ou d'une tentative de suicide ». La loi du 12 juin 2001 tend à renforcer la prévention et la répression des mouvements sectaires, portant atteinte aux droits de l’homme et aux libertés fondamentales. Cette loi est intervenue à la suite du drame de la secte « L’ordre du temple solaire » dont les dirigeants avaient incité au suicide plusieurs centaines d’adeptes. De cette loi est issue l’article 223- 25-2 du code pénal qui sanctionne l’abus de faiblesse. Mais ces lois n’ont pas incriminé l’aide et l’assistance directe au suicide d’autrui. Elles ont incriminé la provocation. De fait, les quelques applications jurisprudentielles qui ont pu être faites de l’article 223-13 du code pénal envisagent le délit de provocation comme un acte de publicité pour le suicide. Ils ne correspondent pas au cas de la personne qui fournit à une autre les moyens de se suicider, à la demande de cette autre. Car alors l’élément moral de l’infraction, à savoir la volonté de provoquer le suicide, n’existe pas. Parce que la seule volonté à l’origine de l’acte létal est celle de la personne qui décide d’abréger sa vie, l’acte

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