Rapport à F. Hollande, Président de la République Française

53 La question est alors de savoir si une vie sous sédation peut avoir un sens d’une part et si elle permet ou non aux proches de poursuivre un accompagnement devant un proche mourant certes, mais apaisé, ce qui peut faciliter le « travail de deuil ». Probablement il n’y a là encore aucune certitude à mettre en avant puisque les situations sont toutes singulières. Même si la médecine réaffirme qu’arrêt de traitement ne signifie pas arrêt des soins, la question de l’arrêt de la nutrition et de l’hydratation est vécue avec un imaginaire d’effroi par l’entourage en raison de la forte symbolique qui lui est attachée. Si l’on suspend l’hydratation et la nutrition, et que pour rendre cet arrêt moins insupportable la décision est prise d’une sédation profonde, quelle est la place et la fonction réelle de ce geste si ce n’est de permettre d’accélérer la mort ? 7. LE RAPPORT DU MÉDECIN À LA LOI Le médecin, au sein de la culture médicale française, a pour vocation essentielle, celle de dépister, diagnostiquer, et traiter. Son action préventive reste modeste et est plutôt axée sur le dépistage que sur celui de l’attention à tel ou tel comportement ou conduite. N’ayant reçu généralement aucune formation à la prise en charge de la personne en fin de vie, son attitude est alors fondée sur des directives légales, des expériences hétérogènes en fonction des spécialités dans lesquelles il a exercé ou il exerce, de ses propres convictions et de son expérience personnelle. Il n’y a quasiment pas de séminaire ou de formation continue qui aborde ces questions. En dehors des structures de soins palliatifs, il n’y a aucune place pour le partage des inquiétudes et des solutions proposées qui se font jour. A l’opposé, les structures de soins palliatifs constituent des lieux de réflexion et de formation de quelques étudiants, mais ne peuvent se substituer à la culture soignante habituelle hospitalière et libérale, plus tentée par les performances de la médecine curative que par le sens des limites. Il y a ainsi un écart considérable entre la minorité de médecins attentifs à ces questions et la majorité qui considèrent que la mort n’est pas de leur ressort et qu’ils n’ont pas été formés pour cela. Les conséquences de cette situation sont majeures. Chaque médecin tente de résoudre cet écart, en se défaussant sur les structures de soins palliatifs, en manifestant son impuissance, ou en adressant à des structures inadéquates les malades en fin de vie. Les médecins libéraux, connaissant plus ou moins bien la loi Leonetti, expriment des sentiments contradictoires. Les uns pensent que cette loi leur a donné des repères permettant de venir en aide à l’ensemble des malades qui leur sont confiés.

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