Libre arbitre et Neuroscience

Libre arbitre et neuroscience La question du libre arbitre compte certainement parmi les (sinon LA) questions qui a fait couler le plus d’encre depuis que l’être humain s’interroge sur sa condition. Or depuis quelques décennies, les neurosciences se sont invitées dans le débat. Et les données qu’elles apportent ne peuvent plus être ignorées par les philosophes. Tout a commencé quand on a découvert, dans les années 1960, qu’un mouvement volontaire (et donc librement initié) est précédé dans le cerveau d’une activité neuronale préparatoire détectable une bonne seconde avant l’exécution du mouvement. Cette activité reçut le nom de « potentiel évoqué primaire ». Puis, dans les années 1980, Benjamin Libet tient ce raisonnement simple mais fondamental : si c’est une décision consciente qui initie toute action volontaire (comme on en a l’intime conviction), alors ce sentiment subjectif devrait forcément survenir avant le début du « potentiel évoqué primaire » qui survient dans les régions prémotrices du cerveau et semble préparer le mouvement. Or les résultats de sa fameuse expérience, où le sujet devait décider et noter le moment où il prenait la décision d’exécuter une flexion du poignet, montraient exactement l’inverse. La décision consciente survenait un bon 350 millisecondes après le début du « potentiel évoqué primaire » (et l’action s’exécutait environ 200 ms après la décision consciente). Le sentiment de la prise de décision arrive donc beaucoup trop tard pour être à l’origine du mouvement volontaire, et ne semble être qu’une illusion que notre cerveau génère pour nous donner l’impression d’être l’agent derrière nos actions. Inutile de dire que cette expérience a donné lieu à de nombreuses critiques et controverses. On a attaqué tant son protocole expérimental que le caractère simpliste de la décision consciente testée (un mouvement simple du poignet) qui ne permettrait pas d’étendre les conclusions de l’étude à des décisions plus abstraites. Sauf que… Sauf que depuis 5-6 ans, l’expérience de Libet a été reprise avec des outils modernes comme l’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf) ou même des électrodes implantées dans le cerveau avant des opérations pour des crises d’épilepsie, et toutes semblent confirmer les résultats de Libet. Mieux, elles peuvent prédire, avec des taux de succès de 55 à 80 %, de 1 jusqu’à 10 secondes avant la décision consciente ressentie par le sujet, quel geste simple (souvent appuyer sur un bouton avec la main droite ou gauche) il va « choisir » de

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