Kant, Emmanuel (1724-1804). Critique de la raison pure. 1869

374 DIALECTIQUE TRANSCENDENTALE tions n'est possiblequ'au moyen de cette idée; par con- séquent ellesert nécessairementde fondementà tout pro- grès vers la perfectionmorale, si loind'ailleurs que nous en soyons retenus par les obstacles que nousrencontrons dans la nature humaineet dont il est impossiblede dé- terminer le degré. La république de Platon est devenue proverbiale comme exemple frappant d'une perfection imaginaire, qui ne peut avoir son siége que dans le cerveau d'un penseur oisif, et Brucker trouve ridicule cette assertion du philosophe, que jamais un prince ne gouvernera bien s'il ne participe aux idées. Mais il vaudrait mieux s'attacher davantage à cette pensée, et (là oùcetexcellent hommenous laissesans secours)faire de nouveauxefforts pour la mettre en lumière, que de la rejeter commeinu- tile sous ce très-misérable et très-fâcheux prétexte qu'elle est impraticable. Une constitution ayant pour but la libertéhumainela plus grandepossible,en la fon- dant sur des lois qui permettentà la libertéde chacun de s'accorder avec celle de tous les autres (je ne parle pas du plus grand bonheur possible, car il en découlera naturellement), c'est là au moinsune idéenécessaire,qui doit servir de principe non-seulementau premier plan d'une constitution politique,mais encoreà toutes les lois, et où il faut d'abord faire abstractionde tous les obsta- cles actuels, lesquels résultent peut-être bien moinsiné- vitablement de la nature humaine que du mépris des vraies idées en matièrede législation. En effetil ne peut rien y avoir de plus préjudiciable et de plus indigne d'un philosopheque d'en appeler, commeon le fait vul- gairement, à une expérience soi-disant contraire; car cette expérience n'aurait jamais existé si l'on avait su

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