Kant, Emmanuel (1724-1804). Critique de la raison pure. 1869
318 ANALYTIQUE TRANSCENDENTALE dérant ainsi comme des objets simplementconçus par l'entendement, de les distinguer des premiers par le nom d'êtres intelligibles (noumena). Or on demande si les concepts purs de notre entendement ne pourraient avoir un sens par rapport à ces derniers et en être une sorte de connaissance. Mais il se présente aussitôt ici une équivoque qui peut occasionnerune grave erreur. Quand l'entende- ment appelle simplement phénomèneun objet considéré sousun rapport, et qu'il sefait enmêmetemps,endehorsde ce rapport, une représentation d'un objeten soi, il se per- suade qu'il peut aussi se faire des concepts de ce genre d'objets, et que, puisqu'il n'en fournit pas d'autres que les catégories, l'objet, au moins dans ce dernier sens, doit pouvoir être pensé au moyen de ces conceptspurs de l'entendement.Il est ainsi conduit à prendre le con- cept entièrement indéterminéd'un être intelligibleconçu commequelque chose de tout à fait en dehors de notre sensibilité,pour le concept déterminéd'un être que nous pourrions connaître de quelque manière par l'entende- ment. Si par noumène nous entendons une chose en tant qu'elle n'est pas un objetde notre intuitionsensible,en fai- sant abstraction de notre manière de la percevoir, cette chose est alors un noumènedans le sens négatif. Mais si nous entendons par là l'objetd'une intuitionnon sensi- ble, nous admettons un mode particulier d'intuition, à savoir l'intuition intellectuelle, mais qui n'est point le nôtre et dont nous ne pouvonspas même apercevoir la possibilité;ce serait alors le noumènedans le sens positif. La théorie de la sensibilitéest donc en même temps celle des noumènesdans le sens négatif, c'est-à-dire de
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