Les Sources Inconscientes de la Misogynie - Gabrielle Rubin

LE PREMIER OBJET D'AMOUR vient prendre la place de la mère que le gendre, attiré par elle, mais terrifié par la crainte inconsciente de l'inceste, se défend contre ses penchants par la peur ou la raillerie. Car l'interdit n'est pas fondé sur une crainte d'ordre eugénique ou des contraintes religieuses ou morales (c'est lui qui les fonde), mais concerne uniquement une réalité phantasmatique. Autrement dit, ces contraintes et ces craintes ne sont que des rationalisations a posteriori. C'est ce que semble prouver cette attirance/répulsion pour la belle-mère. Quelle raison de la logique du cons- cient pourrait justifier pareille attitude ? Voici donc un homme qui a épousé une femme jeune, qu'il trouve jolie et dont il est — a priori — amoureux. Il ne devrait donc normalement ressentir pour sa belle-mère qu'un sentiment assez tiède, quelque chose comme un amical respect. 0i, ce que l'on voit, et ce dans toutes les sociétés, ce sont des sentiments violents se faire jour. Sentiments qui se manifestent par la haine, la crainte ou la moquerie. Chez les Zoulous, par exemple, la coutume exige que le gendre ait honte de sa belle-mère, et la fuie en toute occasion ; aux îles Salomon, un homme doit faire semblant de ne pas connaître sa belle-mère, et s'il la croise par hasard, il doit courir se cacher aussi vite qu'il le peut ; aux îles Banko, si un gendre et une belle-mère empruntent le même chemin, cette dernière doit s'écarter et tourner le dos jusqu'à ce que l'homme l'ait dépassée, etc. Quant aux railleries, plaisanteries et bonnes histoires de belles-mères, on sait qu'elles constituent une part non négligeable du folklore. Or, ces sentiments violents ne sont que des défenses destinées à refouler des désirs amoureux fermement 77

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