Les Sources Inconscientes de la Misogynie - Gabrielle Rubin

L'INTERDIT FONDATEUR ce n'est pas un personnage obscur qui parle, mais Abra- ham évoquant Sara ; eh bien, cela, nous l'oublions. On pourrait multiplier les exemples et les citations ; si l'on s'en tient aux Egyptiens, aux Grecs et aux Hébreux pour l'Antiquité, et aux Maghrébins pour l'époque ac- tuelle, on peut constater que ces peuples ont pratiqué ou pratiquent ce que nous appelons « inceste » : mariages entre oncles et nièces, entre tantes et neveux, entre cousins germains, etc., et pourtant, on ne peut nier qu'ils aient été, ou soient, hautement civilisés et socialisés. Certes, les choses ont changé depuis, et les lois occiden- tales sont nettement plus sévères ; mais dans le nord — chrétien — de la Méditerranée, seuls les mariages entre membres de la famille nucléaire sont vraiment prohibés (pour les autres, il peut y avoir une dispense). Dans le sud — musulman — le mariage entre cousins germains, loin d'être défendu est, au contraire, vivement conseillé, voire imposé. « Dans l'Ancien Monde, on prohibe actuellement l'in- ceste, certes, mais d'une façon qui, de nos jours encore, peut se voir qualifier de négligente. Encore faut-il s'en- tendre sur le sens qu'on donne au mot « inceste ». En le prenant dans son sens ethnologique de mariage avec un parent très proche appartenant à votre lignée, il est possi- ble de .dire que le mariage incestueux est considéré dans toute la Méditerranée comme le mariage idéal 13. » D'ailleurs, un inceste plus grave (l'inceste père/fille) ne soulève lui-même qu'une réprobation somme toute légère ; Germaine Tillion rapporte que récemment, « à Djanet, un personnage religieux ayant eu des rapports avec sa fille, 13. G. Tillion, op. cit., p. 37.

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