Les Sources Inconscientes de la Misogynie - Gabrielle Rubin

LES SOURCES INCONSCIENTES DE LA MISOGYNIE découvertes ont brusquement aboli la distance que l'on pouvait mettre entre les incestes des rois — personnages à part, n'engageant pas, pour ainsi dire, le reste de leur peuple — et ceux des gens du commun, des gens faits à notre image et auxquels nous pouvons nous identifier. Mais ceci n'est qu'une part du problème car, malgré la supériorité sociale des monarques, ils ne sont pas éloi- gnés de nous au point que, toute l'histoire de nos ancêtres étant pleine d'incestes, nous devions être vraiment secoués, troublés, en apprenant qu'en Egypte il existait des maria- ges incestueux dans toutes les classes de la société. En réalité le désir de l'inceste est tellement refoulé en nous, considéré avec tant d'horreur, que, à la lettre, nous ne voyons plus ce qui est écrit sous nos yeux ; nous refusons de savoir que l'inceste a, de tout temps, été pratiqué dans nos régions et nous le projetons, pour nous en débarrasser, sur les « grands », dont nous nous déso- lidarisons. Prenons la Bible par exemple : dans toute la Genèse, il y a des mariages entre cousins germains et ce sont même les plus prisés. (Rappelons que ces mariages sont interdits dans les civilisations chrétiennes comme incestueux ; il est vrai qu'ils ne nous inspirent guère d'horreur). Lorsque nous lisons que les Filles de Loth — dans un but honorable certes, mais enfin... — couchent avec leur père, nous sommes déjà davantage secoués. Il s'agissait toutefois d'éviter la fin de l'humanité, et évidemment, nous leur trouvons des excuses. Mais lorsque la Genèse dit textuellement (20,12) : « Elle est vraiment ma soeur, la fille de mon père, mais non la fille de ma mère et elle est devenue ma femme », 66

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