Les Sources Inconscientes de la Misogynie - Gabrielle Rubin
LA •FEMME DANS LE ROMAN POLICIER fait droguer la jeune fille à tel point que Slim n'a plus qu'une poupée inerte entre les mains. Mais Slim veut quand même sa Princesse, et lorsqu'il apprend qu'elle a été enlevée par une bande rivale, il refuse les ordres de sa mère et veut partir à sa recherche. Alors, M'man emploie l'argument suprême : « Vas-y, reprit-elle, mais réfléchis où ça te mènera. Pense à ta situation quand tu seras tout seul... tu ne pourras jamais plus faire confiance à personne. Faudra te cacher... tu seras forcé de trouver une planque... (Elle le regarda dans les yeux.) Où tu te planqueras, Slim ? » Lui tenir ce discours, c'est lui ôter toute possibilité d'in- dépendance ; c'est lui rappeler qu'il existe un seul lieu réellement sûr, un seul abri inviolable : sa Mère. Et, en effet, Slim cède : « " Qu'est-ce qu'on va faire, M'man ? demanda-t-il.. " M'man respira profondément. Il s'en était fallu d'un cheveu " ». Elle avait tort de s'inquiéter, car il était bien trop tard pour qu'il puisse conquérir son indépendance ; soudé à elle, il ne pouvait que vivre de sa vie, ou mourir de sa mort. Aussi, lorsqu'il apprend qu'elle a été tuée, son univers s'écroule car « depuis toujours, il la croyait indestructi- ble " » ; désemparé, il se réfugie dans la seule activité qui lui procure quelque jouissance : le meurtre. Comme un tragique petit Poucet, il sème les cadavres tout au long de sa route, indiquant ainsi à la police comment le retrouver. Malgré les crimes accumulés, c'est un enfant qui meurt sous les rafales des mitraillettes : « Les yeux jaunes regardaient sans voir, le petit visage 25. Pas d'Orchidées pour miss Blandish, p. 18 . 26. Ibidem, p. 225. 317
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