Les Sources Inconscientes de la Misogynie - Gabrielle Rubin
LES DENTS ET LE SANG Il est évidemment inutile de souligner que tout cela est dépourvu du moindre fondement dans la réalité ; force nous est donc de chercher pourquoi on a doté les femmes d'une surpuissance telle qu'elles en arrivent à pro- voquer un cataclysme qui détruit la terre (comme chez les Indiens Chaco) ou à faire pourrir toutes les récoltes d'un seul regard, ou même — moins spectaculaire mais tout aussi étrange — à faire tourner une mayonnaise par leur seule présence. On voit se dessiner — une fois de plus — derrière toutes ces terreurs, la grande peur de la Déesse-Mère ; car le lien qui relie toutes ces craintes entre elles, c'est le sang. C'est lui qui est en cause, parce que c'est lui qui confère à la femme la possibilité de créer la vie. Le fait que de nombreux peuples déchargent les femmes de leur puissance maléfique dès qu'elles n'ont plus leurs règles, et donc rte peuvent plus avoir d'enfants, semble bien renforcer cette hypothèse. En effet si, comme l'écrit Webster, l'impureté des fem- mes pendant certaines périodes « semble être le point de départ d'une notion fort répandue, celle qui admet l'impu- reté féminine permanente », les femmes âgées, n'étant plus menstruées, et n'ayant donc plus la possibilité d'en- gendrer, sont considérées comme des hommes, et ne subis- sent plus les restrictions habituellement appliquées à leur sexe. Ainsi « les indigènes de l'Australie centrale désignent une vieille femme par un terme qui, traduit littéralement, signifie : " femme/père ". Les mêmes, chez les Zoulous, sont appelées " hommes" ; et il leur est même permis de 305
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