Les Sources Inconscientes de la Misogynie - Gabrielle Rubin
LES SOURCES INCONSCIENTES DE LA MISOGYNIE qu'aux pieds, comme dans une cape). Et il est bien naturel qu'Elle ait des attributs virils sans commune mesure avec ceux des hommes, puisqu'ils font partie de la toute-puis- sance de la Phantasmère. Il faut bien qu'elle ait, non seulement une quantité de pénis, mais encore qu'ils soient démesurés et qu'ils dispen- sent un plaisir au-delà de l'exprimable : c'est, telle qu'elle existe dans l'inconscient enfantin — et qu'elle reste pré- sente bien souvent chez l'adulte —, la Phantasmère. Il n'y a guère que les poètes pour être ainsi en contact avec leur inconscient ; il n'y a que les légendes — et la science-fiction — pour se permettre une telle exubérance : Shambleau ou la Méduse n'ont pas, comme la Mère au pénis évoquée par les analysants, un organe masculin : elles en ont cent, elles en ont mille ; ils sont d'une taille inouïe, et dispensent des plaisirs ineffables. Portés par les ailes de la poésie, protégés par la métaphore, les conteurs en dévoilent bien davantage. Ainsi, de la Méduse, on ne peut détacher le regard ; Shambleau, on ne peut la quitter. Et il faut l'intervention d'un tiers — son ami Yarol le Vénusien — pour que Smith puisse briser l'enchantement. Pourtant Yarol est bien près d'être lui-même saisi ; il est bien près de succomber à l'envoûtement. Car tout le conte est construit comme un jeu de, miroirs : le Vénusien est à la fois le tiers qui va séparer Smith de Shambleau en tuant celle-ci, mais aussi un double de Smith pris, comme lui, dans la fascination qu'elle exerce. Il est le symbole du Père, du héros, du tiers castrateur ; mais le Père aussi risque de rester englué dans les rets de la Phantasmère qui hante son inconscient. Aussi ne sommes-nous pas étonnés de voir que c'est 262
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