Les Sources Inconscientes de la Misogynie - Gabrielle Rubin

LES SOURCES INCONSCIENTES DE LA MISOGYNIE ment une chose possible, puisqu'il voit là, réalisée devant ses yeux, cette chose impensable : un sexe sans pénis ! Si la chevelure de la Méduse est si souvent représentée sous la forme de serpents, c'est parce que ceux-ci « ren- voient au complexe de castration, et, chose remarquable, alors qu'ils provoquent l'horreur en eux-mêmes, ils favo- risent en réalité une atténuation de l'horreur, car ils se substituent au pénis, dont l'absence est la cause essentielle de l'horreur. — Un principe technique est ici confirmé : la multiplication du symbole du pénis signifie la castra- tion 12 ». Dans la nouvelle, la tête de Shambleau n'est pas entou- rée de serpents, mais d'encore bien pire : de gros vers ronds, moites et chauds, de longs tentacules rouges et luisants. C'est dire que L. C. Moore va plus loin que le mythe grec, dans lequel la tête de la Méduse est couronnée de serpents ; ceux-ci, verdâtres et froids, sont assez éloignés de leur modèle pour qu'on puisse prendre quelque dis- tance. Alors que la tête ravissante et perverse de Sham- bleau, couronnée de vers ronds, moites et chauds, pro- voque d'une façon plus certaine encore, chez Smith — et chez le lecteur — une répulsion fascinée. Aussi le pauvre Smith est-il vaincu d'avance, car ce n'est pas une femme * qui est à ses côtés, mais Shambleau qui, pour mieux le capturer, prend le masque de la douce compagne. Et Smith est bien incapable de résister, alors que, sur 12. Freud, a La tête de la méduse xp, in Dygraphe, Ed. Aubier- Flammarion, p. 6. * « Dans le Mythe, c'est l'organe génital de la Mère qui est en question. a Freud, L'Organisation génitale infantile, p. 115. 260

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