Les Sources Inconscientes de la Misogynie - Gabrielle Rubin
LES SOURCES INCONSCIENTES DE LA MISOGYNIE le réel, puisqu'elle aboutit à une satisfaction, certes par- tielle puisqu'il n'aura pas de lait, mais réelle aussi puis- qu'elle lui procurera le plaisir donné par l'excitation de la zone érogène orale. On voit donc que le suçotement est tin des moments importants de l'évolution de l'enfant ; il y en a bien d'au- tres ; par exemple, celui où le sentiment d'un moi corporel commence à se former : lorsque la mère répond aux pleurs de son bébé de façon adéquate, elle l'aide à distinguer entre ses différents moments d'inconfort. Si la mère est capable de deviner que tels pleurs du nourrisson indiquent qu'il a faim, et qu'elle lui donne un biberon, que tels autres indiquent une souffrance et qu'elle ôte une épingle qui le pique ou lui fait faire son rot, alors, petit à petit, le bébé arrivera à distinguer entre ses propres sensations. C'est alors que la sensation devient moins diffuse et que le sentiment d'avoir un corps à lui commence à se développer. Un moment capital est celui de l'éducation à la pro- preté, car l'élimination est un acte éminemment personnel. Jusque-là, même si la tétée comporte une phase active, le nourrisson est tout de même dépendant d'autrui, alors que le contrôle de ses matières fécales dépend exclusive- ment de lui. C'est-à-dire que c'est lui seul qui décide si oui ou non il va se donner le plaisir du soulagement, et si oui ou non il va le faire dans l'endroit approprié, et donc faire — ou pas — plaisir à maman. C'est donc à partir de ce moment- là qu'il prend son destin en main, et que s'instaure le premier échange d'égal à égal : il donne ses matières contre la joie et l'amour de sa mère. 228
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