Les Sources Inconscientes de la Misogynie - Gabrielle Rubin

LA MÉCONNAISSANCE DE LA LOI d'amour ou trop de haine, la mère ne consent pas à libérer son enfant, alors des troubles majeurs sont à craindre. L'autisme infantile est donc une impossibilité de sortir de l'attachement fusionnel à la mère ; l'impossibilité, par conséquent d'acquérir un soi différencié du non-soi, une sorte de mort au monde. Cet état de fusion avec la mère, ce refus de la castration symbolique, que nous voyons poussée à l'extrême chez les autistes, existe à l'état d'aspiration — plus ou moins forte — chez les gens dits normaux. Il n'y a pas que les fous pour désirer rester soudés à la Mère ; tout au contraire, les plus vieux mythes de l'humanité parlent de rAge d'Or, du Paradis terrestre, de ce temps d'avant le temps dont nous parle Ovide, où « les peuples en sécurité poursuivaient leur existence douce et paisible, sa- tisfaits d'aliments produits sans nul effort" » (id est : le lait de la Bonne Mère). Mais '(heureusement pour la civilisation), à côté du désir de retour dans le ventre maternel, existe aussi, chez le nourrisson, un désir d'affirmation de soi ; quelque chose qui, par-delà le manque, et à cause de lui, pousse l'enfant d'abord à nier ce manque en hallucinant le sein, et à agir, c'est-à-dire à dépasser le manque (en suçotant son pouce, par exemple). Il prouve ainsi qu'il a déjà (fût-ce très par- tiellement) accepté le principe de réalité : « — le sein n'est pas là — j'accepte cette réalité — et c'est bien parce que je l'accepte que je fais une action en substituant le pouce au sein, au lieu de me contenter d'halluciner le sein sans plus ». Ainsi l'enfant fait une action qui a prise sur 11. Ovide, Les métamorphoses. 227

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