Les Sources Inconscientes de la Misogynie - Gabrielle Rubin

LES SOURCES INCONSCIENTES DE LA MISOGYNIE sauce de sa propre anatomie, se vivant comme pourvue d'un organe mâle et dépourvue de tout organe féminin (le clitoris étant baptisé « mâle »), puis on affime que n'ayant pas cet organe à sauver, elle ne peut avoir de véritable surmoi ; et comme le surmoi est à l'origine de la sublimation et donc de la culture, il en résulte que les femmes sont — et seront à jamais — incapables d'at- teindre les sommets. C'est donc très précisément sur l'infériorisation de la femme que débouche l'affirmation que le désir de pénis est premier chez elle. Car si réellement la femme désire quelque chose qu'elle ne peut pas avoir, alors — pour les raisons énumées plus haut — elle n'est pas infériorisée (ce qui est réversible) elle est inférieure, ce qui n'est pas susceptible d'être modifié. Comme je me refuse fermement à considérer que la femme est un homme moins le pénis, je pense qu'il est à la fois plus simple et plus proche du réel d'interpréter les faits ainsi : le garçon renonce à sa mère pour sauver son pénis ; cela veut dire : je serai un homme complet, capable d'engendrer, capable de défendre mon territoire, ma femme et mes enfants ; pour lui, phallus et pénis se confondent. La fille renonce à sa mère, elle aussi pour sauver quel- que chose d'essentiel ; mais bien entendu pas le pénis : pour elle, le phallus c'est l'enfant. Car il est évident que si elle restait symboliquement liée à la mère, tout choix d'objet hétérosexuel lui serait impossible à la puberté, et donc tout espoir de maternité. Pour elle comme pour le garçon, le tiers castrateur est indispensable pour briser la dyade mère/enfant ; mais la 204

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