Les Sources Inconscientes de la Misogynie - Gabrielle Rubin
LES SOURCES INCONSCIENTES DE LA MISOGYNIE son : pendant un court temps après sa venue au monde, il continue à être nourri par ce qui sort du corps de sa mère, son lait. Ainsi, Susanô reçoit-il les aliments qui sortent directement du corps d'Ogestsu ; mais très vite il se révolte, pense que ce sont ses excréments que la déesse lui donne à manger et la tue. Le symbole, pour moi, est transparent : il faut refuser de se laisser éternellement nour- rir sans effort, il faut « tuer » la Mère, source de cette nourriture « excrémentielle », sous peine de s'en conten- ter toute sa vie, et donc de ne jamais devenir autonome. Et en effet, à peine la déesse morte; le héros trouve les céréales dont il a besoin pour vivre, et il est évident que ces céréales ne lui arriveront pas toutes prêtes sur sa table, il faudra les semer, les travailler, les cuire, etc. Bref, c'en est fini du lait de la bonne mère qui coulait sans effort. A partir du moment où on n'est plus un enfant, il faut se battre pour gagner sa vie. Si nous passons du Japon au Céram occidental ", nous avons un récit recueilli par la Frobenius Expedition en 1937-1939, où l'on retrouve le même thème : une grand- mère préparait le repas de son petit-fils avec la crasse de son corps. L'ayant appris, celui-ci ne voulut plus manger et s'en alla. Au bout de trois jours il revint ; la grand-mère n'était plus, mais un arbre d'Areng avait poussé de sa tête, un cocotier de son sexe, et des arbres de Sago de son corps ; à leur pied, il y avait des instruments agricoles. En Amérique du Nord, chez les Cherokees, les Creeks et les Natchez, on trouve des motifs semblables ; par exem- ple, chez les Cherokees, les enfants découvrent un jour que 18. Une des Moluques. 148
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