Les Sources Inconscientes de la Misogynie - Gabrielle Rubin

LES SOURCES INCONSCIENTES DE LA MISOGYNIE jamais, je ne riais pas sans motif, et personne (sauf ma mère) n'aurait pu dire qu'on m'avait vu pleurer'. » Il ne présente certes pas cela comme son opinion d'adulte, mais comme celle, un peu ridicule, de l'enfant qu'il avait été ; il n'en reste pas moins qu'il exprime là une façon de voir qui est partagée par bien des humains. Freud écrit par exemple : « La femme reconnaît le fait de sa castration et avec cela elle reconnaît aussi la supériorité de l'homme et sa propre infériorité » et « l'es- sentiel de ce qui, dans l'enfance, concerne la génitalité doit donc se dérouler en relation avec le clitoris. La vie sexuelle de la femme se divise régulièrement en deux phases, dont la première (celle qui concerne le clitoris) a un caractère masculin ; seule la seconde est spécifique- ment féminine 4. » Pour lui, l'organe qui donne la supériorité est l'organe mâle, et la femme, à sa vue, ne peut que reconnaître sa propre infériorité ; et de plus, son propre organe sexuel ne lui appartient pas vraiment, il n'est qu'une pauvre répli- que du pénis, ce qui la contraint, pendant toute la première partie de sa vie, à découvrir la génitalité avec un organe qui n'est pas le sien. Certes, celui-ci fait partie (par une aberration de la nature ?) du corps féminin ; il n'empêche, il n'en est pas moins un organe masculin. Quelle que soit mon admiration pour Freud, je ne peux m'empêcher, devant de telles affirmations, de penser à ce prélat qui, désireux de manger du lapin un vendredi saint, baptisa celui-ci « carpe » et put, incontinent, le savourer la conscience en paix. 3. Marcel Pagnol, Le Temps des Secrets, Ed. Pastorelli, p. 89. 4. Freud, Sur la Sexualité Féminine, P.U.F., pp. 143 et 142. 18

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