Les Sources Inconscientes de la Misogynie - Gabrielle Rubin
LA PHANTASMÈRE lequel elles racontent la tentative de libération d'une femme : Albertine. Celle-ci a quitté son mari pour « vivre sa vie », mais elle a échoué. La dernière page du roman est celle du récit du retour d'Albertine vers son mari et l'ennui. Celui- ci, prévenu par une amie commune, attend sa femme sur le quai de la gare pour la ramener chez lui. Ce qui devait se passer se passe, et une dizaine de mois plus tard, Albertine « mettait au monde un beau petit garçon qu'elle appela tout simplement Alexandre. Albertine avait enfin trouvé son vainqueur '° ». « Chaque année qui passe lui permet de découvrir dans cet enfant des qualités d'audace, de fantaisie et d'ima- gination qu'elle dénie au reste de l'humanité mâle », et les auteurs de conclure : « Jacques (le mari) est heureux, car il aime avant tout que les choses soient normales ri ». Cet amour des mères pour leur enfant explique pourquoi il est impossible aux femmes de radicaliser leur lutte pour obtenir l'égalité des droits, ou du moins en est une des raisons, car il y en a d'autres. Mais pour nous en tenir à celle-ci, il est évident que jamais les femmes ne pourront haïr ce qui est masculin pour la seule raison que c'est masculin. En admettant même (ce qui est bien difficile à croire) qu'elles en arri- vent — le temps de leur lutte — à haïr maris, amants, pères, frères et amis, jamais elles ne pourront haïr leurs fils. Or, toutes les luttes de libération auxquelles nous avons assisté impliquent un passage par la haine de l'op- presseur : que ce soient les guerres d'indépendance, les 10 et 11. Nicole, Les lions sont lâchés, Julliard, p. 237. 113
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